barbaresques en
Méditerranée à l’époque moderne à travers l’exemple de Nice et de son
arrière-pays
DALMASSO
Jean-Louis
La piraterie en Méditerranée est une
activité très ancienne puisque l’on en trouve déjà la trace dans l’œuvre
d’HOMERE. C’est une activité infamante, sans loi ni règle propre. La
course, à l’inverse est licite, avec des règles, des coutumes et même des
lois. Les corsaires possèdent une lettre de marque qui prouve qu’ils sont
engagés au service d’une puissance pour mener à bien leurs rapines sur
mer. La différence majeure avec la piraterie consiste au traitement que
l’on reçoit si l’on est fait prisonnier. Un corsaire est arrêté, enfermé,
libéré à la fin de la guerre à laquelle il participait, alors qu’un
pirate est tout simplement pendu. Cette activité est très lucrative pour
les hommes qui y participent et pour les villes qui accueillent ces gens
de mer si particuliers. C’est elle qui fit la fortune de villes
françaises comme La Rochelle, Saint Malo, de villes italiennes comme,
Livourne, Naples, Palerme et des villes d’Afrique du Nord. Si l’on
associe bien trop souvent la course aux Caraïbes et à l’Atlantique, elle
est durant toute l’époque moderne bien présente en Méditerranée où elle
est née. Elle n’appartient pas non plus à un seul rivage. Les chrétiens
et les musulmans poursuivent par ce biais la guerre sainte qui les oppose
depuis des siècles. On retrouve donc d’un côté les villes italiennes
citées ci-dessus et les chevaliers de Malte basés à La Valette face à la
Sublime Porte (Byzance) qui engage ses corsaires en Afrique du Nord.
La course n’admet que très peu de
trêves, elle se déroule toute l’année avec l’été comme saison de
prédilection. Le mauvais rôle est souvent, pour ne pas dire toujours,
attribué aux corsaires barbaresques qu’un diplomate vénitien qualifie
comme étant « les pires de tous ». Ce sont à ces hommes qui ont fait
trembler tous les rivages de Méditerranée, que nous allons consacrer
cette brève étude, mais également à leurs activités et aux séquelles
qu’ils ont pu laisser dans notre région.
La course barbaresque est basée dans
les trois régences de l’empire ottoman que sont : Alger, Tunis et
Tripoli. L’Afrique du Nord n’avait pas de véritable tradition maritime.
Ce sont les Arabes qui vont l’orienter vers la mer, en prenant exemple
sur Byzance, qui, maîtrisant la mer, les avait mis en position difficile
dans leur longue période de conquête. L’empire ottoman se devait d’avoir
et d’entretenir une flotte, surtout depuis la Reconquista
espagnole. Ce sont les Espagnols qui vont involontairement leur fournir
les hommes d’expérience qui leur ont durant le Moyen Age tant manqués, à
savoir les morisques. Ils furent animés d’un sentiment de vengeance après
avoir été chassés d’Espagne par les rois catholiques. C'est grâce à eux
qu’Alger va prendre de l’importance en Méditerranée. Les hommes qui
incarnent le mieux par leurs actions et leurs parcours très particuliers
la course barbaresque sont sans nul doute Aroudj et Kheir-ed-din
Barberousse. Ils vont défier la puissance espagnole et faire régner
la terreur dans tout le bassin méditerranéen pendant la première moitié
du XVIème siècle. Nés à Mytilène en 1474 et 1476, convertis
très tôt à l’Islam, ils font parler d’eux rapidement. On retrouve dans un
premier temps Aroudj au service du sultan de Tunis. Après s’être évadé de
Rhodes où il était enfermé à la suite de l’attaque avortée d’un navire
appartenant aux chevaliers de saint Jean de Jérusalem, il s’établit à
Djerba où vient le rejoindre son frère. Aroudj va s’imposer en Afrique du
Nord où régnait à l’époque la plus grande anarchie, où le plus fort
l’emportait. Il devient aussi le maître d’Alger, après avoir assassiné de
ses mains le sultan, mais il meurt à Tlemcen, non sans avoir écumé les
mers et gêné le commerce maritime méditerranéen. Sa tête fut envoyée
jusqu’en Espagne ce qui montre bien son importance et le soulagement
d’une partie de la Méditerranée à l’annonce de sa mort. Son frère lui
succède et avec lui Alger va connaître ce que Fernand BRAUDEL appelait
« la première fortune d’Alger »
,
c’est à dire une période faste en prises et en victoires face à l’Espagne
de Charles Quint, avec comme point d’orgue pour notre région le siège de
Nice en 1543. La flotte ottomane, dirigée par Barberousse, était
accompagnée de celle du roi de France, dans une alliance que les
contemporains qualifiaient volontiers d’impie, de contre-nature. La
légende veut que Nice ne doive son salut qu’au courage exemplaire d’une
femme qui devint la figure emblématique de la ville : Catherine SEGURANNE.
Bien que le siège de Nice fut un échec, le seul nom de Barberousse fit
frémir pendant des décennies les habitants de notre région qui ont eu à
faire avec le corsaire le plus réputé de Méditerranée.
La maîtrise de la mer
par l’empire ottoman et des barbaresques s’achève avec la bataille de
Lépante, le 7 octobre 1571. Bien qu’elle mit un terme à l’invincibilité
de la flotte turque, elle n’empêcha pas la course de nuire en
Méditerranée. Si l’occasion était belle l’Espagne ne la saisit pas car
ses intérêts étaient ailleurs, à savoir dans l’Atlantique. Si la grande
guerre n’a à présent plus sa place en Méditerranée, au profit de l’Europe
du Nord et de l’océan Atlantique, l’activité corsaire ne s’arrête pas et
redouble même d’intensité, marquant ainsi la « seconde fortune d’Alger ».
Les provinces du Maghreb, avec à leurs têtes des régents, vont mener à
bien cette forme de guerre qu’ils maîtrisent : la course, où les parvenus
remplacent les puissants. C’est en effet après la bataille de Lépante
qu’elle montre son vrai visage. C’est une activité comme les autres pour
les ports d’Afrique du Nord. Il ne faut pas l’aborder sous un angle moral
mais économique comme l’affirmait Fernand BRAUDEL : « Le prétexte
politique et surtout religieux était purement fictif, dès qu’ils
abordaient un navire, les instincts de pirate prenaient facilement le
dessus sur celui du croisé ». La course doit son succès à une marine de
guerre très performante constituée aux dépens d’une marine marchande, ce
qui s’explique par le fait que les chrétiens gênaient considérablement le
commerce nord-africain. Il faudra attendre la disparition des galères de
l’ordre de Malte pour voir enfin un navire battant pavillon tunisien
accosté à Livourne. Si les navires marchands barbaresques ne
travaillaient jamais avec l’Italie ou l’Espagne pour des raisons
diplomatiques évidentes, ils auraient très bien pu accoster en France,
mais on ne leur a jamais accordé une grande place, même à Marseille où on
leur refusait d’entreposer leurs marchandises. Cette flotte militaire
comptait sur des bateaux rapides et bien armés. Leur force était la
vitesse et la supériorité numérique alors que les navires chrétiens
jouaient sur leur puissance de feu. Ce sont les galères qui
impressionnaient le plus les adversaires, avec leur chiourme qui
pouvaient compter jusqu’à 250 galériens. Elles pouvaient donc attaquer et
fuir aussi rapidement.
Si la flotte était
importante (1581 : 60 galères à Alger) un tel succès ne peut se
comprendre sans évoquer les hommes qui menaient à bien cette activité et
dont un grand nombre était des renégats. Ces hommes ont choisi
d’abandonner la foi chrétienne au profit de la foi musulmane pour
plusieurs raisons. La plus importante est peut-être celle qui veut que le
privilège de la naissance ne compte guère dans la société musulmane.
Ainsi, en rejoignant les côtes de Barbarie, on pouvait améliorer son sort
parfois peu enviable. Si l’on s’en tient à la version de l’Eglise, c’est
le démon qui pousse les hommes à renier leur foi. Le reniement s’explique
bien sûr pour d’autres raisons beaucoup plus matérielles. On reniait pour
échapper à des dettes de jeu ou plus simplement dans le cas où, après
avoir été enlevé, on était vendu comme esclave, pour améliorer son sort
après avoir perdu tout espoir de retour, de la bouche et non du cœur. La
course leur a permis de se distinguer avec une spécialité : le rachat des
captifs. Ils servaient aussi d’intermédiaires aux marchands chrétiens, de
capitaines de navires ou de simples marins. Ce sont eux qui font d’Alger
la capitale de la course en Méditerranée.
Toute région éloignée du
pouvoir central, mal encadrée d’un point de vue administratif, pourvue de
moyens militaires et navals insuffisants représente une victime idéale
pour les corsaires. L’Italie fut le territoire sans doute le plus exposé
aux raids, surtout la Calabre, la Sicile et la Sardaigne. La Corse et les
côtes françaises n’y échappèrent pas non plus. En 1647, ils dévastent la
chartreuse d’Argentière prés de Saint-Tropez, espérant y capturer
l’évêque, mais sans succès. Leur intrépidité ne s’arrête pas à la
Méditerranée. En 1627, on les retrouve à Reykjavik où ils font 800
prisonniers, et ils accostent même en Angleterre en 1631. Alors, que
faire devant une telle menace ? Les autorités prennent des mesures de
prévention en construisant des tours de guets, à l’image de celles que
l’on peut encore trouver sur les côtes corses. Dans notre région nous
pouvions en trouver une à Nice, dans le quartier actuel de Sainte-Hélène,
repérable sur certaines représentations anciennes. La construction et
l’entretien appartenaient souvent aux frais des populations locales. Ces
tours servaient parfois de base de contrebande. Un édit de 1586 à Naples
interdisait toute sorte de magasin dans une tour afin d’éviter tout
commerce. En plus des tours, des cavaliers surveillaient les plages,
d’Italie surtout. Les chrétiens comptent beaucoup sur la contre-course
menée par les chevaliers de Malte. Ils s’installent sur cette petite île,
située entre la Sicile et la Tunisie, en 1522, après avoir été chassés de
Rhodes par les Ottomans. Au XVIIème siècle, cet ordre connaît sa plus
grande activité mais les prises se font de plus en plus rares au fur et à
mesure que l’on avance dans le siècle et encore plus au XVIIIème siècle.
Le deuxième ordre qui lutte en Méditerranée contre l’infidèle est l’ordre
des chevaliers de Saint-Etienne, créé en 1562, et basé à Florence. Lui
aussi est un ordre religieux et militaire avec une discipline de fer. Son
domaine de prédilection est l’Italie. Comme pour les chevaliers de Malte,
ceux de Saint-Etienne voient leur activité diminuer à partir de la
deuxième moitié du XVIIème siècle.
Les rivalités
politiques, militaires et économiques entre les états européens faisaient
en sorte que certains gouvernements ménageaient les régences barbaresques
afin qu’elles deviennent des alliées précieuses. La France a beaucoup usé
de ces relations dans sa lutte contre l’Espagne. Derrière cette alliance
militaire se cache une alliance économique : en empêchant le commerce des
états du Nord de l’Europe de pénétrer en Méditerranée, elle faisait ainsi
le jeu des négociants, notamment marseillais. A partir du XVIIIème
siècle, l’Europe va changer progressivement de politique. Elle profite de
la baisse de régime des corsaires barbaresques pour négocier de moins en
moins avec eux, allant jusqu’à les ignorer. L’aventure barbaresque
s’arrête tout naturellement en 1830, avec l’expédition française sur
Alger, rendue possible dès le moment où ils ne servaient plus les
intérêts d’une puissance européenne, bien au contraire.
L’essentiel de
l’économie des régences barbaresques tenait dans la vente des hommes et
des femmes faits prisonniers lors d’un raid effectué sur terre ou sur
mer. Le prix était fixé en fonction de l’offre et de la demande, de la
qualité de l’esclave que l’on interrogeait pour connaître sa situation
sociale ou sa profession. Les captifs s’efforçaient de prouver leur
pauvreté, leurs défauts, « à les ouïr dire, tous estropiés, tous gueux,
tous malades » comme pouvait l’écrire le père DAN qui a beaucoup voyagé
sur les côtes nord-africaines au XVIème siècle
.
Pour découvrir la vérité, les corsaires regardaient les vêtements et les
mains. La bastonnade pouvait être aussi un moyen d’obtenir des
renseignements. La vente s’effectuait généralement le lendemain de leur
arrivée, sur la place publique ou sur un lieu réservé à cette activité,
le marché aux esclaves, dont le plus célèbre était celui d’Alger. Les
prix pouvaient varier en fonction d’éléments extérieurs. L’annonce d’un
accord avec une puissance étrangère faisait baisser le prix des hommes de
la nationalité en question. Au contraire, les prix avaient tendance à
augmenter à l’annonce de l’arrivée de pères rédempteurs qui se
déplaçaient pour racheter des esclaves détenus à Alger ou ailleurs. Les
plus recherchés étaient les jeunes et ceux qui avaient une spécialité
intéressante comme les capitaines de navires ou les marins. Les prêtres
et les chevaliers de Malte ou de Saint-Etienne étaient aussi très prisés.
Les plus chanceux étaient ceux qui savaient lire et écrire, car ils
servaient comme comptables ou régisseurs des biens de leurs maîtres.
Beaucoup étaient aussi employés comme domestiques. Quand on évoque les
conditions de vie des esclaves, on pense évidemment aux mauvais
traitements que nous rapportent volontiers les pères rédempteurs dans
leurs témoignages. Hormis le cas des galériens, on a souvent exagéré le
sujet pour responsabiliser l’opinion publique, car les supplices étaient
rares. Il ne faut pas oublier que le Coran interdisait de maltraiter les
esclaves, si bien que l’on peut croire en une certaine humanité de la
part de certains maîtres à l’égard de leurs sujets. Les risques de
mauvais traitements augmentaient suite à une attaque de la part d’une
puissance européenne (rares au XVIIème siècle, plus fréquentes au siècle
suivant), après une révolte d’esclaves, ou, plus grave, après une
évasion. Les esclaves chrétiens ne retrouvaient leur liberté par la
rédemption qui pouvait être le fait d’un état, d’un ordre religieux ou
d’une initiative personnelle. L’action diplomatique pouvait réussir
surtout si l’on était ressortissant français, car en vertu des
capitulations signées entre la France et l’empire ottoman, on pouvait
exiger la remise en liberté des français retenus comme esclaves. Avec
l’extension des capitulations à la Grande Bretagne et aux
Provinces-Unies, ces dernières pouvaient prétendre aux même faveurs à
partir du XVIIème siècle. Les œuvres rédemptrices spécialisées dans le
rachat des captifs provenaient de trois ordres :
-
L’ordre des Trinitaires, fondé en 1198 par saint
Jean de MATHA.
-
L’ordre de Notre-Dame de la Merci, fondé par saint
Pierre NOLASQUE en 1218.
-
L’ordre des Lazaristes, fondé par saint Vincent de
PAUL.
Les rachats n’étaient possibles qu’avec la collecte
qui était faite auprès des fidèles. Ces ordres recevaient généralement un
bon accueil, car leur mission était juste et pouvait servir à un grand
nombre de personnes. C’est pour cela qu’aussi étonnant que cela puisse
paraître, on retrouve à Venanson un tableau où est représentée la Madone
de la Merci et un autre représentant saint Jean de MATHA
à Entraunes, datés du XVIIème siècle. Cela signifie que même dans nos
vallées les dangers que représentaient les barbaresques étaient connus.
La côte n’est pas très éloignée, certains ont pu se rendre en Afrique du
Nord pour diverses raisons, un membre de leur famille a pu être capturé
en mer. En 1814, une expédition barbaresque fit prisonniers six
malheureux pécheurs à Carras, près de Nice. Ils furent emmenés jusqu’à
Tunis d’où ils ne revinrent que deux ans plus tard. Un ex-voto
exposé au musée de Notre-Dame de Laghet témoigne de ce douloureux
épisode. Les raids terrestres étant plus rares dans notre région, les
vallées alpines demeurent généralement protégées par leur éloignement du
littoral. Pourtant, on retrouve à Lucéram, dans la chapelle de la Madone
de Boncoeur, étudiée par Georges TRUBERT
,
des ex-voto consacrés à la Vierge Marie, montrant que notre région
reste en contact avec les côtes barbaresques. Beaucoup de bateaux sont en
effet représentés et on sait que des niçois faisaient parties de l’ordre
de Malte
.
Un grand maître de l’ordre fut même un ressortissant de Nice : Jean-Paul
LASCARIS. Des niçois se sont aussi illustrés lors des sièges de Rhodes en
1522 et de Malte en 1565. A Nice, puis à Villefranche, furent aussi
construites les galères du duc de Savoie qui participèrent à la bataille
de Lépante que l’on retrouve dans les peintures murales de la chapelle
des Trinitaires de Saint-Etienne-de-Tinée.
Donner de l’argent pour
une si belle œuvre était un acte très pieux qui, au moment du Jugement
Dernier, pouvait à coup sûr peser dans la balance. A une époque où l’on
se souciait beaucoup de bien mourir, un tel geste ne pouvait être que
salvateur pour son âme. Une fois l’argent récolté, les pères rédempteurs
dressaient la liste des gens à racheter en priorité. Ils devaient être
obligatoirement de la nationalité de la mission et chrétiens, pas
d’étrangers, ni de protestants. Le marché conclu, chaque esclave devait
s’engager par écrit à prendre part à toutes les processions organisées
par la mission rédemptrice pour faire connaître l’œuvre de la mission et
ainsi recueillir des aumônes en vue d’autres rachats. Enfin les
libérations pouvaient être obtenues par les esclaves eux-mêmes. Les plus
fortunés faisaient appel à leur famille qui réunissait très vite la somme
et procédait au riscatto, le rachat, immédiatement après le raid.
Certaines familles s’endettaient, ou dans le pire des cas laissaient
partir le captif qui devait se débrouiller seul. Il arrivait parfois que
l’esclave puisse se racheter et retourner dans son pays d’origine quand
son maître le laissait travailler.
Le rachat a permis aux
différentes régences de remplir leurs caisses de numéraire et de devenir
des places de change d’envergure internationale, ce qui en des temps de
pénurie était très valorisant. Cet argent ne fut pas toujours réinvesti
dans l’activité corsaire, malheureusement pour les régences barbaresques,
mais plutôt dans l’achat de terres, constituant un manque important pour
cette activité qui a eu du mal à se moderniser.
La course barbaresque a profité de la
lutte qui opposait au début du XVIème siècle les grands empires
méditerranéens, espagnols et ottomans. Elle a connu son apogée à la fin
du XVIème siècle et au début du XVIIème siècle pour amorcer par la suite
un lent mais inexorable déclin, en raison d’une stagnation des techniques
mais surtout d’un retard économique de plus en plus sensible par rapport
aux puissances européennes. Sa permanence prouve sa rentabilité pour les
prédateurs, mais aussi sa faible incidence économique. L’Europe
chrétienne a certainement surestimé la puissance des corsaires d’Alger,
de Tunis ou de Tripoli, mais la peur du pirate est restée très présente
dans les esprits. En 1860, un plaisantin à Alméria lance au cours d’une
réunion électorale « Maures à la côte », formule utilisée pour prévenir
les populations en cas d’attaque. L’effet fut immédiat et la place se
vida en un instant. Cette peur se retrouve même dans des contrées
éloignées de la mer comme nos vallées alpines, montrant l’impact et
l’effroi que les corsaires barbaresques ont pu procurer aux populations
des côtes chrétiennes de Méditerranée et de son immédiat arrière-pays
tout au long de l’époque moderne.
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